Le sujet est difficile. Nous ne voulons surtout pas accabler un candidat qui a tout donné dans la mesure de ses moyens et de ceux mis à sa disposition, et franchement, quand on analyse, la France n’a pas décrochée, ce qui était possible. Elle a, avec sa belle chartreuse, défendue très honorablement son statut, pour la seconde année consécutive elle est deuxième assiette du concours et flirte avec le podium, mais on ne peut pas ne pas s’interroger sur ce qu’il faut faire pour compenser le retard.
Récolter à chaque fois un accessit comme le prix de l’assiette est l’arbre qui cache la forêt. Nous avions porté l’attention lors du Bocuse d’or Europe de l’énorme écart à l’arrivée, l’équipe tricolore rendait 200 points au premier, ce qui est énorme, elle rend encore 189 points lors de la finale (201 points sans les notes cuisine que personne ne comprend). Elle n’a donc pas réussi à refaire son retard malgré les promesses face caméra ; c’est la marque d’un échec collectif et sans doute d’une méthode, celle de maints intervenants extérieurs qui ne sont pas des férus de ce concours de cuisine artistique, qui doit conjuguer bon ET beau.
En laissant la polémique des Scandinaves de côté, la France est battue par nos voisins suisses sur le thème plateau, ce qui fut sa force dans le passé ; elle était déjà derrière eux au championnat européen, c’est un signe qui ne trompe pas car le discours était le suivant : « le championnat européen n’est pas le championnat mondial, on refera le retard » (sic). A l’arrivée : 90 points de retard par rapport à la Finlande, 4ème, qui n’en avait que 55 d’avance à Turin, et 19 encore par rapport à la Suisse, 5ème. Précisons qu’il y a 56 points qui proviennent de la notation cuisine pour les Suisses, ce qui est rageant car la France avait engrangée 64 points d’avance sur eux dans une première préparation de toute beauté ; quand on avait fait notre post sur l’hyper-maîtrisée chartreuse qui faisait saliver au premier regard (voir ci-dessous), on voyait la France parmi les 3 premiers et c’est déjà la deuxième fois de suite que la déception est à la hauteur des espoirs soulevés durant le concours.
Pour gagner le Bocuse d’or il faut être au top sur les deux points, assiette et plat. Or sur ce plan la France est en-deça de son niveau et elle n’écoute pas, se persuadant de trouver la recette sans même analyser celle des autres. Ci-dessous les plats viande de, respectivement : Danemark, Finlande, Suisse, France. La différence, sauf avec le premier, n’est pas évidente à première vue. Il semblerait donc bien que nous sommes battus avec les deux qui précèdent au classement gustativement, et c’est inquiétant.
En attendant puisqu’il faut se prononcer devant un résultat en demi-teinte, est-ce que la France est en crise nous répondrons par l’affirmative. Il y a des choses à revoir et il faut surtout arrêter de faire l’autruche et de s’auto-persuader que la France peut faire cavalier seule dans une hypothétique remontada. Il faudra mobiliser toutes les initiatives (nous avons ainsi des faiblesses sur le design des plats) et être plus à l’écoute des tendances. Prendre le meilleur et remettre en question le reste. En 2021 le dernier podium français remontera à 9 ans. Une longue traversée du désert.